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Cicatrices d’or

« j ai pas grandit sur la soie, mais j ai cousu mes cicatrices en or. »


Cicatrices d’or
Cicatrices d’or

Je n’ai pas grandi sur la soie. Mes nuits n’ont pas été repassées, mes matins n’ont pas eu d’odeur de lavande. J’ai appris à marcher sur des planches rugueuses, à ramasser des morceaux qui saignent, à faire des poches avec des mains tâchées. La vie ne m’a pas offert de draps parfaits — elle m’a jeté des éclats, des enseignements, des adieux. Mais ces éclats, je les ai polis. Ces enseignements, je les ai tissés.


Et puis j’ai cousu mes cicatrices en or.


Ce n’est pas une métaphore clinquante; c’est un rituel intime. J’ai pris les déchirures que le monde m’a ouvertes, et j’ai brodé dessus un fil qui ne ment pas. L’or n’efface pas la douleur — il l’illumine. Quand la lumière le touche, la faille devient une rive où l’on peut déposer une main. La blessure reste, mais elle ne me dévore plus. Elle chatoie.


Chaque cicatrice est une leçon. Certaines m’ont appris la prudence, d’autres l’ardeur. Certaines m’ont forcé à regarder mes peurs en face; d’autres m’ont donné le courage de rire avec la bouche encore secouée. Je porte ces marques comme on porte une médaille de bataille — non pour prouver que j’ai survécu, mais pour rappeler que j’ai transformé ce qui me brisait en quelque chose qui peut servir.


Je veux que chaque phrase ici soit une caresse, parce que je connais la fatigue des cœurs qui se cachent. Je veux que mes mots soient un oreiller, une voix douce qui dit : « tu as tenu bon ». Et en même temps je veux que ces mêmes mots soient une gifle, parce que la douceur sans vérité s’étouffe. La gifle réveille. Elle rappelle qu’on est vivant, qu’on doit se redresser, qu’on n’a pas le droit d’oublier le feu qui a chauffé l’acier.


Aimerues-tu la version polie? Bien sûr. Mais la vérité a aussi des angles. On continue donc, en équilibre — caresse et gifle, réconfort et secousse.


Quand j’ouvre la bouche pour raconter une blessure, je choisis la clarté. Je nomme l’échec, je nomme l’oubli, je nomme la trahison — parce que nommer, c’est déjà panser. Et quand je tends la main, ce n’est pas pour ramasser une larme et la poser dans un tiroir. C’est pour montrer qu’on peut transformer la larme en semence. Que la douleur, correctement travaillée, devient matière première d’une résilience magnifique.


Tu peux te demander : comment faire pour broder l’or sur ses propres failles? Commence par regarder. Ne fuis pas la trace. Passe tes doigts sur la ligne — sens la rugosité, accepte la cicatrice comme une carte. Ensuite, choisis ton fil : la tendresse, le pardon, l’apprentissage, l’obstination. Et commence à coudre. L’aiguille n’est pas douce, parfois elle pique. Elle oblige à la patience. Mais chaque point rapproche le bord de l’un avec l’autre, et bientôt la lumière glisse sur le fil d’or, révélant une nouvelle texture.


On me dit parfois : « c’est dramatique ». Peut-être. Mais il y a une sauvagerie tendre dans ce que je fais. Je prends ce que le monde a voulu jeter et j’en fais un ornement. C’est un art de survie qui ressemble à de la poésie.


Alors je t’invite — toi qui lis — à ne pas te contenter de cacher. À ne pas camoufler la brûlure sous un vernis. Embrasse la fracture, apprends-lui une langue nouvelle, et rends-la plus belle qu’elle n’était. Transforme la honte en histoire, la chute en passage, l’abandon en carte. Fais de tes cicatrices un atlas pour revenir à toi.


Pour finir, une dernière caresse — et une dernière gifle : accepte tes blessures comme des preuves de vie, pas comme des condamnations. Porte-les, apprête-les, montre-les si tu veux. L’or n’efface pas le temps passé, mais il le célèbre. Et dans ce geste, dans cette couture, on découvre que l’on n’a pas seulement survécu — on s’est inventé.


« j ai pas grandit sur la soie, mais j ai cousu mes cicatrices en or. » — garde-la comme un mantra, un couteau et une fleur.


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